(CTPD du 30 mars 2011)

Entreprise de destruction massive à l’Éducation Nationale !

En 5 ans, le gouvernement a supprimé 50 000 postes dans le service public d’éducation au nom de la RGPP. Cette année encore, 16 000 postes sont supprimés. L’hémorragie continue de toucher une école primaire sous-dotée. Le rapport du Centre d’Analyse Stratégique constate que « la France a déjà le taux d’encadrement le plus faible de l’OCDE », en particulier pour l’enseignement primaire.

Selon les résultats des évaluations internationales PISA, « les écarts se creusent, renforçant les inégalités sociales » : le système éducatif français est de plus en plus inégalitaire et injuste. Chacun sait que les mesures de suppressions vont encore aggraver cette situation, parce qu’elles auront des effets dévastateurs sur les effectifs des classes, la scolarisation des enfants de moins de 3 ans, l’aide aux élèves en difficulté, les conditions de travail des personnels, les remplacements et l’éducation prioritaire. Le Ministère surcharge les classes, il supprime les maîtres surnuméraires, alors même que le rapport sur les RAR l’affirme : « Les enseignants supplémentaires constituent un véritable levier (…) pour le dynamisme pédagogique dans les réseaux. »

Les résultats PISA montrent également sans aucune ambiguïté que « la pré-scolarisation (maternelle) est efficace et améliore les résultats. Il apparaît dès lors que les élèves issus de l’immigration et/ou d’un milieu défavorisé qui suivent un enseignement pré-primaire de qualité sont susceptibles de bénéficier davantage de cette expérience ». Malgré cela, cette scolarisation des deux ans est gravement compromise !

Madame l’Inspectrice d’académie, nous usons beaucoup de guillemets dans cette déclaration préalable, mais c’est parce que nous citons des organismes officiels : CAS, Cour des comptes : même eux le disent !

Et nous allons continuer nos citations avec le Syndicat des Inspecteurs de la FSU : « Évidemment, nous mettrons ces mesures [de carte scolaire] en œuvre car elles relèvent de nos fonctions. Cependant, nous n’avons pas l’intention, dans les discours que nous tiendrons auprès des équipes enseignantes, des parents d’élèves ou des élus, de tenter de leur faire croire que ces mesures puissent être justifiées par d’autres motifs que ceux d’un choix politique de réduction budgétaire », écrit le SNPI-FSU dans une lettre ouverte adressée aux IA-DSDEN, datée du 14 mars 2011. « Nous ne prendrons pas le prétexte d’études incertaines sur le taux d’encadrement des classes pour faire croire que la preuve scientifique est désormais administrée que le nombre d’élèves par classe n’a aucune relation avec leur réussite scolaire. (…) Nous ne relativiserons pas la portée que représente, chaque jour, pour des centaines d’élèves, dans certains départements, le fait que leur enseignant absent ne puisse être remplacé, faute de moyens suffisants », conclut-il.
Et vous, Madame l’Inspectrice d’Académie, comment justifiez-vous les mesures que vous devez nous communiquer ?

La FSU se refuse à l’instauration de cette école à 2 vitesses : qu’on fasse l’inventaire de ce qui a été offert à l’enseignement privé : possibilité de déductions fiscales par le biais de fondation confessionnelle, loi Carle qui oblige les communes à financer l’enseignement privé, non respect des quotas de diminution de postes du privé, reconnaissance des universités catholiques, … la liste est longue et les moyens ainsi offerts considérables. Il s’agit bien, objectivement, de casser l’école publique et de fournir de meilleures conditions de travail, d’accueil, de moyens de fonctionner au privé qu’au public.

Du côté des salaires et du niveau de vie des enseignant-e-s, rien ! Ainsi les personnels qui se déplacent ne voient pas leur enveloppe s’allonger, ni le montant de l’indemnité kilométrique augmenter, malgré l’envolée des coûts de l’essence. Les salaires restent bloqués et nos revenus ne cessent de diminuer puisque les cotisations augmentent. Comment se loger dans une grande ville pour un PE débutant avec une rémunération mensuelle de 1342 euros en zone 3 ? Quel avenir et quelles perspectives de carrière quand on sait que seulement 1,39 % des enseignant-e-s des écoles bénéficient des indices liés à une intégration dans la hors classe des professeur-e-s des écoles et plus de 60 % d’entre eux partent à la retraite sans avoir atteint l’indice terminal de 658 à l’échelon 11 (2548,95 € mensuel dans la classe normale). Aujourd’hui la plupart des économistes s’accordent à dire que sans un relèvement significatif des salaires, aucune relance économique n’est possible.
Dans ces conditions comment s’étonner que notre métier attire de moins en moins d’étudiant-e-s ? En Côte d’Or, le nombre de candidat-e-s a été divisé par 3 en 3 ans ! Que dire des perspectives de recrutement de l’an prochain ! Comment préparer l’avenir d’une nation sans éducation ? Abraham Lincoln le disait : « Si vous trouvez que l’éducation coûte cher, essayez l’ignorance ! », c’est visiblement le choix de nos dirigeant-e-s.

Que penser de la formation des enseignant-e-s ? Avec une formation initiale quasi inexistante, comment les enseignant-e-s tout frais émoulus de l’université vont-ils pouvoir se former tout au long de leur carrière vu que la formation continue est réduite à peau de chagrin ? Quels progrès pédagogiques peut-on espérer quand la recherche est à l’abandon et que la majorité des collègues ne peut plus participer à aucune action de formation ? Que dire de ces actions de formation qui prétendent former à l’accueil d’enfants primo-arrivants ou porteurs de handicap lourd (autisme, …) en … une journée, deux journées ? Quels extraordinaires puits de sciences devons nous être pour arriver à assimiler en aussi peu de temps ce que d’autres doivent étudier pendant des années… ! Ou alors faut-il croire qu’on leurre les parents, qu’on crée des conditions de travail inadaptées dans le seul but de créer des tensions dans les établissements, de vouer à la vindicte populaire des enseignant-e-s désignés comme les seuls responsables de l’échec d’un système qui n’est plus piloté que par l’argent ? En un mot, il s’agit bien de remplacer un service par un service de moindre qualité mais à moindre coût. Il s’agit bien d’organiser la fuite vers le secteur privé payant pour les plus riches et d’avoir un service a minima pour les autres.
Parce que nous pensons que la formation des enseignant-e-s est un des leviers fondamentaux de la transformation de notre système éducatif, nous ne pouvons qu’exiger que l’on revienne sur la formation des enseignant-e-s. Même le président de la république semble en convenir.

En ce qui concerne les négociations sur les Agents Non Titulaires, nous dénonçons le fait que les précaires de nos écoles, EVS et AVS, en aient été exclus dès le départ. Nous réclamons pour ces personnels la création de véritables emplois pérennes et statutaires, ce qui permettrait une véritable aide administrative pour tous les directeurs et directrices d’école.

Pour le SNUipp-FSU, il est urgent d’investir dans l’école, et de faire d’autres choix en lui attribuant un budget à la hauteur des enjeux !

En ce qui concerne notre département, la volonté de masquer cette politique de casse du service public et d’abandon des responsabilités étatiques s’est soldée par un repoussement des opérations de carte scolaire. Gageons effectivement qu’un certain nombre d’électeurs et électrices attachés aux valeurs républicaines n’auraient pas laissé passer un tel renoncement.

Concernant les instances statutaires, nous ne pouvons que dénoncer les obstructions incessantes au travail des commissaires paritaires (documents remis tardivement, incomplets, dans des formats bloqués, …). On retrouve bien localement le refus d’un réel dialogue social, assorti d’un mépris à peine dissimulé, caractéristiques de ce gouvernement. Nous en avons encore eu la preuve hier dans votre refus d’entendre notre déclaration.

En lisant le document que vous nous avez transmis, nous voyons nos craintes confirmées. Nous assistons à une attaque en règle contre la maternelle : ainsi, on constate qu’elle représente 38% des ouvertures, mais 52 % des fermetures. De nombreuses maternelles disparaissent par le biais des fusions d’écoles. L’école maternelle a une spécificité qui ne peut, ni ne doit, se fondre dans une école primaire. Cette idée n’est pas neuve puisque Pauline Kergomard la prônait dès la fin du XIXe siècle. Et nous ne parlons pas des grandes sections que l’on promène au gré des effectifs, comme à Til-Châtel. Nous déplorons également le changement de discours sur l’accueil des deux ans, mettant les équipes en porte-à-faux vis-à-vis des familles et compromettant les relations de confiance et le dialogue tant prôné dans les circulaires de l’administration.

La difficulté scolaire paye aussi un lourd tribut avec des suppressions de postes dans les établissements et dans les RASED : poursuite de la disparition de postes G, et fermeture de deux postes de psychologues. Nous sommes loin d’une carte à moyens constants dans l’ASH, alors que ceux-ci faisaient déjà défaut auparavant. Par ailleurs, nous constatons qu’aucun moyen n’est prévu pour l’accueil des primo-arrivants alors que les prévisions sont à la hausse.

Et que dire de la formation continue ? Sept postes de la BFC disparaissent dans le département ! Quand on le met en parallèle avec le peu de consistance du plan de formation, on voit bien quelle place lui est réservée dans l’Éducation Nationale !
Et que dire des manques en matière de remplacements qui compromettent gravement le droit à l’éducation ? Au vu du nombre d’absences non remplacées, nous attendions de voir abonder les moyens en remplacements de notre département.

A la tendance de ces dernières années, qui ont vu augmenter les effectifs moyens des classes, viennent s’ajouter d’autres processus de destruction : nous assistons cette année à une mise en pièces programmée du système public d’éducation, par la désorganisation même de son fonctionnement, par le biais de la suppression de postes clés comme celui de conseiller pédagogique départemental ou d’enseignant-e chargé de la CDOEA.

Il est désespérant de constater que, d’année en année, le vaisseau Éducation nationale s’enfonce de plus en plus. Le naufrage est lent et douloureux, mais bien réel. L’école ne sera bientôt plus en mesure de jouer son rôle de service public garant d’équité et de qualité pour toutes et tous. Nous ne pouvons accepter ce renoncement à une politique ambitieuse de réduction des inégalités et de démocratisation des savoirs.